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Matteo Pict

Chambre 7

Je dors…

Journée très fatigante hier. Comme d’habitude, j’ai fait mes longueurs dans le lac et ma randonnée dans les bois. Aucune de ces deux activités n’est de tout repos. Le problème c’est que j’avais oublié la sortie du soir. Deux heures de marche de plus, dans la nature. Et j’étais obligé d’y aller !

Déjà je m’étais inscrit et je n’aime pas faire faux bond. Mais en plus, j’avais charge d’enfant. Adèle, la fille de la patronne de l’auberge, m’avait sélectionné pour lui servir d’accompagnateur. Elle était venu me voir jeudi soir pendant que je lisais dans le salon en me disant qu’elle voulait vraiment aller à la sortie, qu’elle ne pouvait pas y aller parce que sa mère ne pouvait pas l’accompagner, que ça la rendait vraiment très triste, que ça serait vraiment bien que quelqu’un l’accompagne.

Et donc c’est comme ça que je me suis retrouvé, après une vérification auprès de sa mère et un café un peu serré, dans la voiture de Gaston, livreur et chauffeur pour l’auberge. J’avais laissé la place à l’avant à une autre occupante de l’auberge, pour rester à coté d’Adèle.

Adèle est une enfant très vive et elle avait plein de questions, en particulier sur le livre qu’elle m’avait vu lire au salon. Je lui ai expliqué le principe de l’urbex tout en lui précisant que c’est dangereux. Quand je lui ai dit que je n’en faisais pas moi-même, elle a voulu savoir pourquoi je lisais ce livre. J’ai commencé à lui expliquer mon intérêt pour l’architecture en général, mais nous sommes arrivés avant que je puisse continuer.

Nous étions un bon groupe venu de l’auberge. Les autres étaient venus avec le mini-car de la patronne, conduit par le factotum de l’auberge. Il y avait deux guides pour nous accompagner, un homme et une femme, tous deux à peine plus âgés que moi. Le mec était plutôt agréable à regarder d’ailleurs. Peut-être que dans d’autres circonstances…

Mais, entre autres, j’avais dans ma main celle d’une enfant d’une dizaine d’années à qui il ne devait rien arriver. Nous avons donc suivi la promenade, écoutant les bruits de la nuit, observant les paysages nocturnes, tentant de voir quelques animaux sauvages. Réussissant, même. Nous sommes tombés sur quelques vers luisants, au grand bonheur des enfants présents. Les deux guides ont expliqué, mais la biologie n’est pas mon fort et je n’ai quasiment rien retenu. Nous avons pu observer quelques étoiles. (C’était pas gagné, les nuages étaient aussi de sortie.) J’ai expliqué en aparté à Adèle comment repérer certaines étoiles et constellations. Cassiopée et son W. Orion et sa ceinture. Les Trois Belles d’Été : Deneb, Véga et Altaïr. Sur celles-ci, j’ai eu un peu plus de mal. Je ne suis pas habitué à un ciel avec autant d’étoiles visibles. Mais je crois qu’Adèle était contente.

Sur le chemin du retour, Adèle a voulu courir jusqu’à la voiture. Cette enfant est pleine d’énergie et elle s’était retenue jusque là. Je l’ai donc laissé faire. C’est là qu’elle est tombée ! Elle a posé son pied sur un caillou roulant et elle s’est retrouvée par terre. Je me suis précipité vers elle, suivi de près par le guide. J’ai assis Adèle et j’ai commencé à regarder si elle avait des blessures, pendant que le guide sortait une trousse de premier secours. Il n’y avait rien de grave, juste un genou écorché. Le guide a désinfecté et posé un bon gros pansement sur le genou. Il a aussi donné un bonbon à Adèle avant d’aller rassurer le reste du groupe.

Adèle s’est remise à pleurer en regardant sa jambe. Entre deux sanglots, elle m’a expliqué que son pantalon était déchiré, que c’était son pantalon d’aventurière, que sa mère n’allait pas être contente. Effectivement, il y avait plus de dégâts sur le pantalon que sur le genou. Alors, je l’ai regardée et je lui ai fait un grand sourire.
“Tu sais garder un secret, Adèle ? Tu n’en parleras à personne ?”
Elle m’a regardé avec ses grands yeux interrogateurs. Pendant ce regard, j’ai passé ma main au dessus de son pantalon et je l’ai Réparé. Comme neuf. (Je dis bien comme neuf, parce que j’en ai profité pour Réparer l’usure classique de ce pantalon, au passage.) Personne n’a rien vu. De toute façon, il aurait fallu être le nez sur le pantalon pour voir quoi que ce soit.
“Regarde, ton pantalon d’aventurière est tout beau tout propre. Tu vas pouvoir le porter encore.”

La fillette n’a rien dit mais s’est jetée à mon cou. Je l’ai décrochée et je lui ai proposé de la porter sur mes épaules jusqu’à la voiture. Elle était ravie. Heureusement que ce n’était pas loin, parce que une séance de nage, deux randonnées, une frayeur, une Réparation et une enfant sur les épaules commençaient à avoir un impact. Je sentais bien la fatigue.

Nous sommes rentrés à l’auberge sans plus de problème et je suis allé m’effondrer sur mon lit.


Et maintenant, malgré tout ce que j’ai fait hier, je suis quand même réveillé aux premières heures du jour. Autant en profiter pour me faire un bon café et raconter tout ça.

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