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Caroline Etienne

Chambre 7

La fin des histoires

Mercredi 9 septembre

J’ai passé la journée à Pollox. Visiblement le client de l’hôtel friand de légendes n’était pas Claude. Mais j’ai trouvé une marchande de fleurs qui a semblé le reconnaître. Sans trop de certitudes et il n’aurait rien acheté, ça ne m’avance pas beaucoup…

À midi, j’ai mangé au Café des Sapins. C’était le jour de congé de mon serveur, ça tombe bien, je n’avais pas tellement envie qu’il pense que j’étais revenue pour lui.

L’après-midi, en continuant mon porte-à-porte dans les commerces avec ma photo de Claude, je suis retombée sur cette petite échoppe de seconde main dans laquelle Christophe et moi avions cherché ensemble un cadeau pour ma nièce la dernière fois que je l’ai vu. Ça a fait remonter un flot de souvenirs. Heureusement que j’avais plus ou moins fini ma tournée. J’ai repris mon vélo pour repartir, la tête ailleurs, le cœur aussi, et à la sortie de la ville, j’ai vu un immense panneau publicitaire d’un type qui clamait son amour à un autre, je crois bien que je me suis mise à pleurer un peu, heureusement que le vent a éparpillé mes larmes. Cette histoire ne les mérite pas.

Mais quelle histoire ? Depuis toujours, je romance ma vie. J’écris dans ma tête la façon dont je vais raconter tout ce que je suis en train de vivre en permanence. Je cherche des rapprochements ou des sens cachés à tout ce qui m’arrive pour éclairer le passé ou deviner le présent. Je catégorise mes relations, je fais danser la réalité[1], j’étiquette les comportements. Et surtout j’ai besoin de chutes bien nettes dans mes arcs narratifs afin que mon récit tienne la route.

Avec Chris, il me manque des éléments. On a passé un an ensemble pourtant. Ou en parallèle plutôt qu’ensemble. Mais en partant, il a déchiré la fin du livre et je n’avance plus depuis.


Jeudi 10 septembre

Ce matin, j’ai écrit mon épilogue. Il manque de fioritures, de grands élans, de jolis éclairages sur l’héroïne, mais ça fera l’affaire.

« Caroline est retournée à Pollox dans le secret espoir d’y revoir Christophe. Elle ne l’a pas revu mais elle s’est rendue compte que même si la plupart des questions sont restées en suspens, cette histoire mérite désormais un point final. »

N’est-ce pas une métaphore de mon enquête ?

Rapport de mission - Mercredi 9 septembre
Tenté de trouver une trace de la cible au village voisin, Pollox
Piste chez la fleuriste - sans suite
Je suis dans une impasse

Note

[1] J’adore ce film.

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