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Jeanne Lalochère

l’aubergiste

Un mail à Gabriel

Cher Associé,

Je te fais la récap par écrit de ce qu’on s’est dit au téléphone, comme promis. Bouge pas j’enfile mon tailleur executive woman. Voilà. Donc, avec des chapitres et tout :

Côté structure

L’ancien collègue de Charlie qui est maintenant spécialisé en droit des sociétés va bosser sur des statuts précis. On ne peut pas faire une Scop, en tout cas pas dès maintenant, car il faudrait pour ça que les salariés rachètent l’entreprise. Ils n’ont pas le fric et nous on n’en a pas envie. L’idée serait donc de faire un genre de mix entre société par actions et Scop, c’est-à-dire que les CDI prendraient chacun une part (à prix abordable) et que les décisions seraient prises à une personne = une voix, sauf que toi et moi, on aurait un droit de véto vu que le risque financier est largement de notre côté. L’arrivée en CDI donne droit à une action. À son départ le salarié doit la revendre à la société. Toi tu aurais un statut actionnaire fondateur autorisé au vote mais dispensé d’activité (ou un truc du genre).

Comme on a besoin de fonds pour réaliser les projets (à suivre plus bas) et que de toutes façons ça ne fait pas de mal de prévoir projets et coups durs, les bénéfices seront versés moitié pour l’investissement/risque, moitié répartis à égalité entre tous les salariés, dont moi plus toi. Si l’auberge devait être vendue ou liquidée, on récupèrerait les uns et les autres à proportion par contre. Donc pas d’inquiétude pour ton « assurance-vie ».

En parallèle, Gaston pense réalisable le montage d’un fonds de soutien à l’économie locale avec des partenariats dans lequel l’auberge serait partie prenante. De notre côté on renforcerait les « circuits courts » avec les producteurs et les entrepreneurs locaux ainsi que les collectivités locales.

Côté projets

C’est le gros morceau. Il faut qu’on avance sur ce qui nous fera de nouvelles sources de revenus mais pour ça il faut dépenser des sous qu’on n’a pas :-P

La Gum’s Band étant pleine de ressources, c’est cette fois Léo la pièce maîtresse. Les « siamoises » comme les appelle Gaston ont l’air d’ados quand tu les vois en train de jouer à la marchande à l’auberge mais quand elles enclenchent le mode pro ce sont de vrais rouleaux compresseurs. Gaston avait commencé à lui parler des projets il y a quelques jours et quand on y est allés hier soir, elle avait déjà fait des avant-plans et commencé à contacter des entrepreneurs pour des devis. J’étais estomaquée !

On est tous d’accord que l’activité resto fait plus de marge que l’activité chambres, surtout avec la qualité de la cuisine et la réputation qu’on est en train de se faire — Janette va former quelqu’un pour prendre le relais je t’ai dit ? Ça serait dommage de ne pas capitaliser là-dessus, il faut donc qu’on ait une activité resto non liée forcément à l’hébergement. Le prix du repas avec chambre pourrait rester identique mais le resto seul on peut avoir des prix de 30% supérieur facile.

Ce qu’elle propose c’est qu’avant de faire un futur agrandissement en faisant une extension côté cuisine + actuel resto + patio, on réaffecte l’actuel salon en salle de resto principale avec le charme supplémentaire apporté par la cheminée qui s’y trouve, où on pourrait faire rôtir d’alléchantes viandes sous les babines des clients. On peut facilement y adjoindre la véranda avec des tables en plus avec pleine vue sur le lac. L’actuel resto serait en deux parties : on conserve l’activité restaurant (en cas de beaucoup de monde ou groupes) et on y ajoute… un BAR. Oui tu as bien lu.

C’est Victor et Madeline qui m’en ont parlé : ils n’ont finalement que peu de clients de l’auberge et quand ils en ont c’est surtout l’après-midi en fin de balade. Ils atterriront là quoi qu’il en soit, peu importe bar ou pas à l’auberge. Et un bar, ça rapporte beaucoup, dixit les comptes de Denis ;-)

On regrouperait pour le moment deux ou trois chambres du premier étage (9 et 10 a priori) pour un salon-bibliothèque tranquille pour les résidents, qu’on repasserait en chambres après l’extension d’ici deux, trois, cinq ans selon les finances.

Henri carbure à fond de son côté et hier soir il nous faisait remarquer que si on proposait des balades guidées en traineau ou en raquettes avec départ de chez nous ça apporterait forcément des gens qui resteraient dîner. Surtout si, il est malin, on a des formules balade + apéro. Une fois là, bien au chaud avec les bonnes odeurs venant de la rôtisserie, ils enchaîneront facilement. J’aime bien quand Henri réfléchit ! Léo pense que la structure du hangar à bateaux est hyper saine et qu’on peut facilement le réaménager dans un premier temps, l’étendre plus tard, pour y faire un guichet et entreposer le matériel. Aux Adrets, ça les intéresserait d’étudier une association avec nous sur cette activité et c’est eux qui s’occuperaient des chiens.

Comme tu le vois, rien de farfelu ou de grandiose côté travaux, c’est essentiellement dans l’activité, donc les embauches, qu’il va falloir prévoir un fond de roulement pour les premiers mois. Gaston pense qu’un crédit et le soutien du fonds de solidarité est très faisable. Ou qu’il achète un bon paquet de parts (en gardant le principe de une personne une voix mais avec lui aussi droit de veto) en finançant les travaux lui-même. On n’a pas fini de creuser cette piste, la réflexion est plutôt à faire de son côté en fait.

Côté équipe

Comme je t’ai dit, ils me donneront leur réponse à la réunion de mercredi soir (sauf peut-être Natou à laquelle j’ai laissé un peu plus de temps). Je leur détaillerai tout ce que je viens de t’écrire. Je suis un peu stressée j’avoue. J’ai du mal à me concentrer sur autre chose. C’est pire que quand j’attendais les résultats de mon examen de l’école hôtelière je crois !


Voilà pour les nouvelles de tes placements mon cher Associé. J’enlève mon costume et je te félicite pour le nouveau tien : je suis super heureuse pour toi que les Sœurs de la Perpétuelle Indulgence aient accepté ta candidature et je veux une photo au plus vite ! Tu seras la plus belle, je n’ai pas de doutes.

Tu me confirmeras pour votre venue à la fin du mois ? Je suis super contente que tu puisses te libérer pour trois jours et j’ai hâte de vous présenter tout le monde.

Marco s’est mis en tête de m’obliger à me sortir la tête de l’auberge (ou l’auberge de la tête, c’est selon). C’est lui qui nous a invités hier chez Gaston avec Henri et les filles. Il est venu me chercher jusque sur le perron avec Scarlett à grands coups de klaxon…

Gabriel c’est affreux, tu dois venir à mon secours, je crois que j’ai perdu toute dignité en découvrant — sous le regard hilare des clients (et de Henri qui était arrivé voir ce qu’il se passait) — ce qu’il avait peint sur sa voiture. Ce qui est encore plus affreux c’est qu’une fois la surprise et la gêne passée, ça m’a rendue complètement idiote et je lui ai sauté au cou, là devant tout notre public attentif. Je ne donne pas la journée avant que chacun ici soit au courant… Je te laisse découvrir ça quand on viendra vous chercher à la gare, il paraît que c’est de la peinture qui ne part pas à l’eau. Henri était trop occupé à rire et à me couver d’un regard niais pour penser à protester contre le sacrilège fait à son gravillon, le traître.

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