Madame Lalochère,
Mon travail d’écriture est arrivé à son terme. Je me réjouissais de passer quelques jours de plus à l’auberge, à profiter d’un moment de repos, mais ça ne sera pas possible. On m’appelle d’urgence à Paris. J’ai réglé mon séjour à monsieur Durand, votre veilleur de nuit.
Je vous prie de recevoir mes salutations.
Madame Desfontaine
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Margaux,
Je me permets de vous appeler Margaux, nous avons presque le même âge. Vous trouverez dans ce paquet le petit carnet que l’auberge offre à ses visiteurs. J’y ai recopié un conte que je viens d’écrire. J’aimerais le faire illustrer pour publication. Pourriez-vous le lire, si cela ne vous ennuie pas ? J’ai remarqué votre talent pour le dessin, en particulier un croquis de chat très expressif que je vous ai emprunté et que vous retrouverez glissé dans ces pages. C’est exactement le genre de dessin que je souhaite pour illustrer mon travail. Voudriez-vous vous en charger ? Si vous êtes d’accord pour le faire, appelez-moi. J’ai noté mes coordonnées sur la page de garde.
À bientôt, j’espère.
Nokomis Desfontaine
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Bébé Côme,
Je laisse aux bons soins de monsieur Durand ce petit hochet. J’ai fait avec les moyens du bord, j’ai habillé une cuillère à miel au crochet. J’espère que tu prendras plaisir à en agiter les cordons. Mon ouvrage est bien maladroit, mais Amarok a dit les mots secrets pour donner à tes rêves une couleur apaisante et t’aider à trouver le sommeil. Dis à tes mamans que j’ai utilisé le fil spécial bébés de la ferme des chèvres. Tu peux le porter à ta bouche sans danger.
Affectueusement,
Nokomis
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J’ai posé mon stylo, j’ai terminé la rédaction de mon dernier conte. J’ai bien mérité un moment de détente. J’ai pris ma bicyclette et je suis allée passer un moment à la ferme des chèvres. Florine, à la boutique, m’a présenté différentes qualités de laine. J’ai bien l’intention d’en rapporter à Paris, cette activité est véritablement propice à la réflexion et à la méditation. Quand je serai plus à l’aise avec le crochet, je m’essaierai au tricot. C’est alors que Baptiste est arrivé en courant, le téléphone à la main.
— Nokomis ! Puisque tu es là, prends l’appel, c’est Yahto !
J’ai pris le téléphone. J’ai écouté. J’ai raccroché. Je l’ai rendu à Baptiste.
— Je dois rentrer immédiatement. Amarok est tombée.
Baptiste m’a trouvé un train et a promis de m’emmener à la gare. Florine a empaqueté les écheveaux de laine que j’avais choisis et m’a offert un jeu d’aiguilles. Je suis vite rentrée à l’auberge préparer mes bagages. J’ai emballé le petit carnet pour Margaux, le hochet que j’ai fabriqué pour Côme, et je suis descendue à l’accueil pour régler mon séjour. La nuit était tombée depuis un bon moment, il n’y avait plus que le veilleur de nuit, mais il a accepté d’encaisser ma note. Je lui ai remis les paquets. Baptiste a embarqué mon vélo dans sa guimbarde, mais la remorque ne tenait pas.
— J’ai vu monsieur Bonaventure* l’observer avec intérêt. Dites-lui de la garder pour lui, je suis sûre qu’il en aura l’usage. Au revoir, monsieur Durand.
J’ai jeté un dernier coup d’œil sur le lac. La lune était presque pleine et l’éclairait d’une douce lueur.
— On dirait que je vais encore rater la pleine lune, j’ai dit, avant de monter dans la voiture de Baptiste.
* J’adore ce nom.
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Note de l’auteure : Pour raconter cette histoire, je me suis beaucoup inspirée des Algonquins, un peuple amérindien. Beaucoup de choses sortent aussi et uniquement de mon imagination. C’est pourquoi j’ai dû inventer un peuple imaginaire : les Algoronquins.
1 Commentaire de Mel'O'Dye -
ooooh :’( <3
2 Commentaire de Kozlika -
Bon retour, Nokomis, en espérant que c’est rien de grave pour Amarok !
3 Commentaire de Sacrip'Anne -
Bon retour et tous mes voeux de rétablissement à Amarok. Que tout aille bien.
4 Commentaire de Noé -
Oh oui, tous mes vœux pour Amarok aussi. Bonne route, Madame.
5 Commentaire de Come-de-la-caterie -
Suis OK pour adopter (ou me laisser adopter ?) par le chat :)
Au revoir Nokomis et merci pour la dimension onirique de ton séjour…