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Jeanne Lalochère

l’aubergiste

Il faut tout un village

« Allo Jeanne ? Alors finalement, vous venez demain ou pas ?

— Coucou Gabriel. Oui, oui, on vient ! Gaston m’a enfin répondu. Il reprend les livraisons demain et je me suis arrangée avec Léo pour qu’elle nous conduise à la gare. Ou inversement peu importe.

— Super. Votre chambre est prête, j’ai hâte. On a hâte Manu et moi. Et ne dis rien à Adèle mais on a une copine conductrice de métro, elle va la faire monter en loge.

— Wow, génial !

— Et sinon ça va ? Où tu en es avec Marco ?

— Rien de neuf. Je suis allée sur un coup de tête à Saint-Claude déjeuner avec lui dimanche pendant qu’Adèle était à un barbecue, mais sinon rien. Je ne voulais pas la contrarier en réinvitant Marco à la maison.

— C’est pas très sympa.

— Non, mais il comprend bien que je…

— C’est pas très sympa pour Adèle.

— Hein ?

— De lui coller la responsabilité de savoir si tu as le droit ou non de construire une relation et avec qui.

— Grumpf. Depuis quand tu es devenu un grand sage ? Faut t’appeler Gandhi maintenant ?

— Je comprends que tu sois contrariée que ton grand frère ait toujours raison mais c’est pas une raison pour m’insulter. Gandhi était un gros con misogyne et raciste.

— Okayyyy, je vais retourner bosser, frangin. Et pour ton information, c’est Marco qui viendra nous chercher à la gare jeudi soir.

— Ton idée ?

— La sienne. Mais j’ai dit oui !

— C’est bien. Et puis casse pas la tête comme dirait ton pote Henri, ça va bien se passer dès qu’elle arrêtera de croire qu’il faut te protéger.

— Me protéger ?

— Protéger les remparts que tu ne gardes plus plutôt. Ça n’a rien à voir avec Marco lui-même. Elle me parlait souvent de lui au téléphone, elle l’aime bien, presque autant que son garage. Tu savais qu’elle s’est prise de passion pour les vieilles bagnoles ? Tu crois qu’elle tient ça de Papi ?

— Uh ? D’où ça sort ? Je ne savais même pas qu’elle connaissait son garage ! Gaston ?

— Ha, ha, oui Gaston, quand elle arrive à s’incruster dans ses tournées ils font souvent le détour.

— Ah ben ça alors ! J’avoue je ne leur ai jamais demandé de détails, quand elle est avec lui je délègue sans problèmes.

— Eh ouais, tu sais pas tout sur ta gamine et ça va pas s’arranger avec l’âge. Prépare-toi, frangine !

— Je compte quand même t’en demander plus demain sur vos conversations téléphoniques. Si je t’appelle Lao Tseu, ça passe ?

— C’est déjà mieux, oui. Puis on n’est même pas sûrs qu’il ait existé, ça limite les risques d’être déçu. Au fait, si tu veux me faire passer un interrogatoire je réclame la même peine pour les autres : Henri, Charlie, Lucien, Léo, Natou, Gaston, Tiago, Vernon, Janette… Je crois qu’on a tous eu droit à notre entretien les yeux dans les yeux avec ta Zazie.

— Saperlipopette, je tombe de ma chaise. Je vais tâcher de digérer ces infos. Et Gabriel…

— Oui ?

— Merci. À demain frangin !

— À demain ma crevette. »

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