Oh Gianni, mon fils, comme je suis malheureuse loin de toi. J’ai hâte de retrouver notre banc où nous nous asseyons pour cancaner des infortunes des uns et autres. Les Fortini se sont-ils apaisés ou veulent-ils toujours me loger une olive fatale entre les deux yeux ? Tu te rappelles du chien du vieux Lisandru Fortini qui est mort écrasé par ton arrière-grand-père ? Pendant des années, ils nous ont dit qu’ils l’entendaient hurler les nuits de pleine lune. Oh Gianni, fais taire cet esprit animal. Pense à ta pauvre mère, je t’en supplie, u mo figliolu. Fais en sorte que je rentre sur mon île au plus vite.
Je ne me sens pas en sécurité dans cette auberge. L’autre jour, un fou a manqué de tous nous écraser avec son bus. Misère. Heureusement il n’a détruit que des plantations. Peut-être en profiteront-ils pour revoir leur décoration avec de beaux aconits. Ces traits dans le gravier étaient d’un sinistre ! Tout comme leurs arbres, aucun pin laricio ici. Que des sapins ! Du bois avec lesquels on fabrique les cercueils ! Le chauffeur de ce bus m’inquiète. Je l’ai surpris à parler à sa charrette plusieurs fois. Ou il a une figue molle à la place du cerveau ou la machine est hantée ! Comment s’appelait ce film que tu m’as infligé l’an dernier avec la voiture rouge tueuse ? Catherine ? Voilà, son véhicule est possédé comme Catherine.
Je pourrais aussi te raconter cette cliente qui a manqué de faire une attaque quand je suis sortie de ma chambre. Elle est devenue livide comme si un revenant lui avait ôté le sang. Ensuite, elle m’a sauté dessus tel un cursinu affamé sur un os, persuadée de me connaître. J’ai prié Santa Maria Assunta de me protéger et je me suis enfuie d’elle. On ne sait jamais, sa folie est peut-être contagieuse.
Oh Signore ! Je ne survivrai pas longtemps encore à cet exil. Entre ce bus possédé et cette femme exsangue, j’ai bien cru que mon cœur allait lâcher.
Ghjesù Ghjesù ! Les Fortini m’ont retrouvée. Ils veulent me faire mourir de peur et ils ont contacté la Mafia des Fantômes !
Gianni, u mo figliolu, veni quì ! Et apporte la carabine !
1 Commentaire de Feuilledethé -
Finalement, les Fortini sont peut-être moins dangereux que les clients de cette auberge …
2 Commentaire de GG -
Vu tous les esprits qui rôdent autour de cette auberge et dans les bois, celle ne m’étonnerait nullement que la Mafia des Fantômes débarque.
3 Commentaire de Natou auteur -
C’est bien pire Livia, c’est la mafia des bisounours ;-)
4 Commentaire de Avril -
Ghostbusters !
5 Commentaire de Sacrip'Anne -
Ce qu’on aime chez Livia, c’est son sens de la nuance 😁
6 Commentaire de Pep -
Et elle ne perd jamais de vue son objectif : il lui faut une carabine. ;-)
7 Commentaire de Liliane du Bois -
Billet qui me donne le sourire ce matin !! Je ris toute seule… “me loger une olive fatale entre les deux yeux”, “une figue molle à la place du cerveau”… Bien joué !
8 Commentaire de Paul Dindon -
Ça vient de là, le Figolu ? (ok je sors). Blague à part, chapeau l’auteure.