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Ann-Kathrin von Aalders, Gräfin von Ersterbach

Chambre 1

Fin du premier chapitre - Ende des ersten Kapitel

Chère Marie-Ange,

Je vous écris cette lettre assise dans le train de Bourg-en-Bresse vers Lyon où je vais prendre un avion de retour vers Vienne.

Le vide que je ressens est tellement immense que je ne trouve pour le mesurer que la sensation de plénitude qui est la mienne lorsque je pense aux dernières semaines.

Akikazi et moi avons passé la nuit ensemble dans ma chambre, après un dîner en tête à tête hier soir. Tout est un peu brouillard dans mon esprit. La nuit fut tendre et tendue à la fois. Nous nous sommes réveillés tôt pour finir nos bagages avant de prendre le peti déjeuner.

En descendant vers neuf heures, je me suis trouvée nez à nez avec Éric Javot et une jeune femme qui était ici au début de mon séjour, est partie il y a trois semaines et revenue hier ou avant-hier et semble être très proche d’Éric. Elle m’a abordée sans plus de cérémonie.

— Comtesse ! Wie geht es Ihnen? Das Leben ist wunderschön! Elle s’est mise à rire : “Voilà à peu près l’étendue de mon allemand ! Je me présente, June/Elisa. Je vous connais grâce à People Star Magazine.”

Éric s’est interposé :

— June ! Puis se tournant vers moi : “Ne l’écoutez pas Ann-Kathrin, elle va vous faire la grande scène du II mais elle sait toute la vérité !”

— Ah Javot ! Laisse-moi parler ! Vous permettez que je vous appelle Ann-Kathrin ?

— Bien sûr, dis-je en souriant.

— Je disais donc que je vous connais grâce, ou plutôt à cause de, People Star Magazine, mais aussi parce que je séjournais ici quand vous êtes arrivée.

— Oui, je me souviens de vous. Vous portiez souvent des lunettes noires.

Elle soupira.

— Oui, j’ai eu moi aussi mon moment de gloire non voulue. Et du coup je voulais juste vous dire que j’étais désolée. Désolée que ces paparazzi vous aient traquée, même si c’était par personne interposée. Désolée aussi du fait que cela n’était pas la première fois pour vous, si j’ai bien compris. Désolée enfin que vous ayez eu à subir tout cela avec cet homme.

Son visage se fendit d’un immense sourire alors qu’elle désignait du menton Éric Javot qui leva les yeux au ciel. Je ne pus m’empêcher de rire.

— Ce fut un plaisir de le rencontrer ! Je vous demande pardon de vous avoir fait des frayeurs… si toutefois je vous en ai fait.

— Une demi-seconde, peut-être ? Lui et moi sommes un nous tout frais dont les limites ne sont pas encore clairement établies, et puisque je suis habituée à la presse qui raconte n’importe quoi, je suis allée à la source directement. Il a beau être réalisateur de grande classe, il ne vaut pas un clou en tant qu’acteur et n’aurait su jouer la surprise avec un tel brio le jour où le magazine est sorti.

Javot s’indigna.

— Hé, ho ! Je suis là et j’entends tout !

June et moi nous sommes mises à rire. Elle enchaîna :

— J’espère que nous aurons l’occasion de faire plus ample connaissance !

— Malheureusement, je quitte l’auberge ce matin. Mais si vous voulez vous joindre à nous pour le petit déjeuner, ce sera avec plaisir.

Akikazi nous a rejoints et nous nous sommes assis tous les quatre pour un petit déjeuner rapide mais fort sympathique. J’ai demandé à June de bien faire attention à Natou, je crois qu’elles sont amies.


Le moment finit par arriver où il fallut dire au revoir. J’ai croisé Natou juste avant de sortir. Elle avait encore les yeux un peu rouges d’avoir pleuré mais nous avons échangé quelques mots et je lui ai dit qu’elle aurait toujours une amie à Vienne si d’aventure elle passait par là. Elle m’a fait promettre de passer un jour la voir à Marseille. En remettant ma clef à Madame Lalochère, je n’ai pu m’empêcher de lui dire :

— Vous avez là un établissement spécial, Madame. Je vous remercie de m’avoir si bien accueillie, il y avait longtemps que je ne m’étais pas sentie aussi bien. Je ne crois cependant pas que j’en ferai la publicité auprès de mes amis viennois, j’aurais peur qu’ils gâchent l’ambiance.

Elle me sourit de son sourire franc qui illumine les yeux et retint un rire, privilégiant un ton professionnel.

— Je suis ravie que cela vous ait plu et que vous ayez trouvé ici un peu de répit. Bon voyage, Madame Aalders.

Akikazi et moi avons donné les bagages au chauffeur de la grosse Mercedes qui nous attendait devant la porte et nous sommes regardés. Akikazi me prit la main et là, sur le pas de la porte, au vu et au su de tous les résidents présents, m’embrassa. Un long baiser, profond et tendre, comme pour sceller le fait que cette auberge serait à jamais notre auberge, quelles que soient les péripéties que la vie mettrait en travers de notre chemin. D’abord surprise, je paniquai un peu puis me laissai aller et lui rendit son baiser.

Quand nous sommes montés dans la voiture, je pense que je devais être cramoisie. Nous avons passé l’heure de voyage jusqu’à Bourg-en-Bresse blottis l’un contre l’autre, les mains enchevêtrées. Arrivés à la gare, nous avons pris un café et il m’a mise dans le train pour Lyon. Le sien ne part que plus tard pour Lausanne. Je vous passe la scène d’adieux, j’ai cru que le train ne partirait jamais.

Marie-Ange, le premier chapitre de cette histoire à quatre mains est terminé et ni l’un ni l’autre des auteurs ne savent comment l’histoire continue.

Vous qui suivez depuis le début, avez-vous une idée ?

Je vous embrasse. Fort.

A-K. v. A.

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