Auberge des Blogueurs

Ces premiers jours ont filé à toute allure. Il y a une semaine, je serrais Claire dans mes bras pour son départ en stage à Berlin, je tombais sur Hervé pour le bombarder de recommandations, car même s’il est psychiatre, ami de la famille et suit Claire depuis… depuis… depuis qu’elle en a eu besoin, j’étais tellement anxieux. Bref, j’embrassais fort mes parents, enfourchais la moto et moi aussi je partais, pour ce Jura inconnu.
Je n’en reviens pas de cette « aventure ». Oui, j’écris « aventure », car dans ma vie, c’est un tel chamboulement. Je sais que certains se moquent de ce jeune-vieux garçon si proche de sa famille, le protecteur de sa petite sœur, qui ne sort pas, ne boit pas, et blabla… Je m’en fous. Claire est la personne la plus importante dans ma vie, et depuis que des ordures l’ont… Je n’arrive pas à l’écrire, c’est si dur de même seulement y penser. Bref, je me dis aujourd’hui, notre chemin en famille a été dur, mais avec une telle proximité et tant d’amour. Et là, elle est en stage de médecine, sous la protection d’un type en qui j’ai toute confiance, elle est amoureuse et Florence, la femme de sa vie, l’accompagne… et elle est heureuse. Et j’en suis si ému et heureux.
Et nos parents, si éprouvés ces dernières années qui peuvent passer du temps ensemble, se retrouver sans leurs grands gamins. Je leur souhaite d’en profiter. À l’écoute de leurs sorties, balades, promenades, projets, je me dis que c’est bien parti.
Être loin pour la première fois de ceux qui me sont le plus proches m’a déboussolé, ramené à l’enfance, quand on découvre le monde, comme mon seul été en colo. J’échange plusieurs textos par jour avec maman, papa, Claire, Hervé, Florence, ce sont mes liens aux autres, mais peu à peu je me fraye un autre chemin.
Au boulot par exemple, l’ambiance est très chouette. Même si je suis souvent seul dans les champs et les forêts, je rencontre des agriculteurs et des éleveurs passionnants. Je me sens bien avec eux. Et mes collègues aussi sont sympas. Je me sens détendu et en confiance avec tous ces inconnus. Après ces années d’études et de premiers contrats là où j’avais fait mes stages, en terrains familiers, je parcours des chemins nouveaux, mais en croisant le même amour de la nature, des animaux, de la vie.
Dans l’auberge, c’est encore autre chose. Il y a une variété de personnes, un vrai festival. Des gens touchants, comme celle qui a pleuré en public, des calmes, des excités, des ravis, des grognons. Et le personnel est aussi une source d’étonnements. Il y a beaucoup de personnes que je n’aurais jamais rencontrées ailleurs. C’est vraiment une aubaine dans ce moment-là de ma vie, si excitant et si angoissant loin de mon quotidien. C’est sûr que d’être réveillé en pleine nuit par l’alarme incendie n’est pas en soi une partie de plaisir, mais ça ajoutait un épisode pittoresque, j’en ai ri (quand j’ai su que ce n’était qu’une fausse alarme !)
Bilan de ces premiers temps : il y a de grands bonheurs (mes trajets en moto, les marches dans la forêt…), les plaisirs (la mousse au chocolat du restaurant de l’auberge…), des p’tites joies comme juste dire bonjour à des gens qui irradient de gentillesse, parfois aussi timides que moi. Ça va pas être simple pour franchir le premier pas. Un jeune gars, Matteo a l’air vraiment sympa, Jeanne, une dame plutôt âgée me sourit avec un mot gentil dès qu’elle me croise. Il y a pas mal de randonneurs, peut-être que nos chemins vont se croiser
Je me sens devenir plus confiant pour nouer des relations. Cette semaine était chargée en découvertes, en émotions, en ressentis, en sentiments forts intensément vécus pour ceux qui me manquent et dont l’absence confirme nos liens précieux, mais j’en sors apaisé et moins timide.

Bon, maintenant, je vais me coucher, la soirée avec le syndicat d’initiative pour marcher dans la forêt la nuit et admirer les étoiles ce soir qui a clos cette première journée de repos, entre lecture et flânerie, me donne envie de rêver. Rêver de ce nouveau monde, celui de ma vie d’adulte qui s’épanouit.