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Mela Brinderbe

Chambre 15

La magie des pierres.

(Chambre 11)

J’ouvre un oeil et j’entrevois l’oiseau coloré qui picore des fruits juteux… Il y a quelques myrtilles, des poires et du melon. Il évide les petites baies avec gourmandise…

Il a repris du poil de la bête… (pourtant il n’est pas carnivore)

Je suis torse nu, allongé sur un lit aux draps de lin et je porte un collier sur lequel se trouve une tourmaline noire.

Je l’aperçois. Elle est magnifique.

On a assemblé mes cheveux avec un ruban imbibé d’un liquide au parfum étrange. C’est comme ça que je les portais il y a une quinzaine d’années.

La pierre sombre paraît rayonner. Elle vibre un peu… me réchauffe. Ça tourbillonne dans ma tête. Ça se heurte… Ça frictionne… Ça tambourine… Ça se calme maintenant.

J’entends un cri rauque de haine, ce qui semble être des chants psalmodiés… Puis le silence.

Je respire un peu mieux.

Un brouillard m’étreint, puis se dissipe.

- Qui suis-je ?

Impression de mieux me connaître pourtant. Je suis engourdi. Mes jambes sont lourdes.

Des giclées d’effluves remontent un peu en moi. Je respire mieux.

- Qui suis-je ? Pourquoi ne suis-je pas dans ma chambre ?

- Raph…

- …ia

Je ferme les yeux…


(Ploumanac’h - 1er décembre 2006)

Nous rentrons dans notre maison, épuisés par la longue randonnée sur la lande et la course pour rentrer, en suivant le sentier des douaniers qui longe les rochers de granit rose.

J’adore me promener avec elle, et sentir le temps qui défile (tic tac) : apprécier l’écume, s’enivrer d’un vol d’un huîtrier pie, regarder l’horizon… redessiner des yeux cette ligne en se promettant de ne jamais la courber… même lorsque nous serons très vieux… et que notre mémoire défaillira un peu (beaucoup, passionnément), mais que l’autre lui rappellera leur passé par des caresses sur les rides de son visage.

Nous contemplons tour à tour les formes des récifs colorés, nous leur donnant un nom… “le nuage”, “La goélette” “le p’tit moulin à vent du Crac’h ” puis nous nous embrassons… encore et encore…

- Mon amour, j’ai une bonne nouvelle à t’annoncer ?

Je la regarde l’oeil qui pétille comme je le fais quand elle sait que je suis heureux juste en observant mon regard.

- Nous attendons un bébé !

Mon coeur bat si fort ! Je me précipite dans ses bras…

- Gra allazig din ! me dit-elle


(Ploumanac’h - 20 février 2006)

- Tu penses à la grotte ? Il aurait été conçu là-bas ?

- P’tre bien ! Elle rit aux éclats, me prends la main et m’entraîne dans notre chambre

- Taol ma dillad d’an traoñ !


(Ploumanac’h - 20 Mai 2006)

- L’échographie est formelle. Vous allez être les heureux parents d’une petite fille. Vous avez déjà songé à un prénom ? si c’est indiscret je n’ai rien dit bien sûr… notre ami médecin sourit.

Nous répondons d’une même voix “Maéla” !


(Chambre 11)

Le toucan claque du bec.

Attachés à mon poignet gauche : un bracelet de cuir très fin, qui se termine par un noeud coulissant avec deux petites perles de couleurs, comme celles que portent parfois les enfants.

Y sont accrochés deux oeils de tigre, finement veinés, à forme ronde.

Ils me chauffent un peu le bras.

J’essaie de me lever mais je n’y arrive pas. Comme paralysé.

Je m’enfonce à nouveau. Mon bras brûle plus fort. La tourmaline s’éclaircit puis redevient noire.

Le toucan claque de plus en plus fort du bec. Il saute sur lui même, et s’envole par la fenêtre restée grande ouverte.

Des pas précipités dans le couloir, le cliquetis d’un loquet que l’on empoigne, une respiration rapide, le grincement du parquet ciré, la porte de la chambre s’ouvre…

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