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Natacha, dite Natou 13

Chambre 4

A la pêche au ...

Fatche ! Je suis tellement fière ! Faut que je vous raconte té !

Avé Jojoff, on avait décidé d’aller à la pêche hier matin. Y bossait pas ce jour-là.

Y m’a prévenu :

- Je connais rien à la pêche, mais je sais ramer.
- T’inquiète pas vé ! Je gère, j’organise, ça me fait plaisir.

Et me voilà parti à la recherche de monsieur Henri. Je le trouve dans son hamac, ronflant sonore ! Ho peu chère, y faisait trembler la broussaille !

J’hésite, je me dis « Vaï, fais pas la jobastre ! si tu le réveilles maintenant, tu vas te faire marroner ». Pas le temps de m’escamper, qui boulègue, baille à pierre fendre et ouvre ses yeux de bogue.

- Pardon monsieur Henri, je voulais pas vous déranger. Je reviendrais plus tard.
- Hop hop hop Natou, maintenant que t’es là et que je suis réveillé, vas-y, déballe, y a un souci ? T’as besoin d’aide ?
- Bé, c’est juste qu’avec Joseph, on voudrait faire une partie de pêche mardi matin.
- Ah mais en voilà une idée qu’elle est bonne ! Tu t’y connais en pêche toi ?
- Bé, j’y allais minotte avé mon père.
- Tu pêchais quoi ?
- Bé quand on avait de la chance, de la daurade, des petites rascasses, et de la friture vé !
- Tu pêchais du bateau ou du bord ?
- Bé, les deux, selon.
- Bon. Et joseph ?
- Bé lui, y m’a dit qui savait ramer mais que pour la pêche c’est pas trop son truc.
- L’essentiel c’est qui sache tenir sur une barque ! Rendez-vous mardi matin à l’embarcadère près de ma plate. Je vous embarque matelot !
- Oh merci monsieur Henri !
- Ça va ! Casse pas la tête !

Le matin, je croise Adèle au petit déjeuné et je lui dis qu’on va pêcher. Oh bonne mère ! qu’est-ce que j’avais pas dis-là !

- Je veux en être ! Je veux en être ! je veux en être !

On aurait dit une manifestation. J’y ai chicané un peu

- Bé ! elle est ou ta pancarte ?
- Sans rire Natou, emmène-moi avec vous !
- D’abord c’est pas moi qui décide c’est ta mère. Et, je veux que ce soit elle qui me dise que c’est ok !
- Je vais la chercher !
- Attends ! Est-ce que tu sais nager ?
- Oui !
- Ok, va chercher ta mère.

Salette ! Elle devait pas être bien loin parce que j’ai à peine le temps d’avaler ma bouchée que je vois Adèle tirant sa mère par la main.

Jeanne. Vous savez pêcher ?
Natou. Je faisais ça souvent avé mon père.
Adèle. T’es d’accord hein dit maman ?
Jeanne. Je ne suis pas contre, mais tu me promets que tu obéiras à toutes les consignes que te donneront Mademoiselle ou Henri ?
Natou. Vous en faites pas Madame, je veillerai bien sur elle. Comme si c’était ma petite sœur.
Jeanne. Bon et bien, c’est d’accord.
Adèle. Yes !!!
Natou. Va te chercher un gilet déjà ! Fais frisquet sur l’eau. Et change de chaussures, faut pas que tu glisses ! Et retrouves nous à la barque.
Adèle. J’y vais !

Et elle file comme l’éclair !

Natou. Elle est gentille votre petite !
Jeanne. Oui, elle est un peu… Vive.
Natou. Bah, c’est une aventurière !
Jeanne. Oh ça ! Bon je vous laisse, j’ai du travail. Et merci pour Adèle.
Natou. Pas de quoi !

On se retrouve tous devant la barque. Monsieur Henri rougne quelque chose que je comprends pas quand y voit Adèle. Elle lui fait son plus beau sourire ! c’est joli té ! De le voir fondre comme un glaçon dans un coca.

Natou. Monsieur Henri, vous avez un gilet de sauvetage pour Adèle ?
Henri. Ouais, je vais chercher ça dans le hangar.
Natou. Bon Adèle écoutes moi. Une barque ça bouge beaucoup et tu peux te retrouver dans l’eau et nous avec, à peine le temps de dire « ouf ». Donc, il ne faut pas bouger, pas gigoter, pas sauter. Bref, faut se tenir tranquillou.
Adèle. Promis Natou.
Jojoff. Voilà Henri qui revient.
Henri. Tiens, enfile ça.

Nous voilà équipé. On embarque, Jojoff prend les rames. Henri guide. Adèle a un sourire qui fait trois fois le tour de sa figure !

Adèle. Dis Henri ? Tu crois que tu vas le prendre le sandre aujourd’hui ?
Henri. Qui t’as parlé de ça toi ?
Adèle. Je vous ai vu avec Gaston et les clients l’autre fois.
Henri. Ah… Arrêtez-vous là Joseph. On va être bien.
Jojoff. On peut se tutoyer.
Henri. ça me va. Natou prend cette canne, celle-ci est pour toi, Jo.
Adèle. Et moi ?
Henri. Tu n’étais pas prévu alors tu regardes.
Natou. T’inquiète, je te prêterai un peu la mienne.

Je commence à tout préparer, la ligne, je règle le bouchon pour la profondeur moyenne, l’hameçon et l’appât. Henri y me regarde faire, y dit rien. Jojoff, y me regarde faire y dit :

Jojoff. Et bien ! Tu as l’air d’une professionnelle !
Natou. Hoï, c’est pas grand-chose ! Mais ça me fait plaisir. C’est mon père qui m’a appris les gestes.
Henri. Bon pêcheur, ton père.
Natou. Oh ça oui !

Je suis prête. J’esplique à Adèle tout en faisant :

- Bé, pour lancer ta ligne, tu entraines la canne derrière toi, doucement ! Comme ça, vé ? Tu appuies sur le bouton du moulinet et tu le gardes enfoncé avec ton pouce, regarde ! Là faut être rapide ! Tu lances la pointe de la canne devant toi, tu relâches le bouton au milieu du lancer. Vé ! Comme ça ! Fan, Attention ! Ne force pas trop, sinon ton appât risque de se décrocher de l’hameçon. Vé, maintenant, laisses dériver. C’est bien ninette… Garde le haut de la canne à hauteur de figure. Vé ! La ligne commence à se tendre. Surveille la pointe de la canne hein ! Attends que la truite morde bien dans l’appât. Alors, tu sentiras que ça tire fort.

Une fois que c’est fait, je dis plus rien. On attend. Adèle ne quitte pas la canne des yeux, Jojoff ne me quittes pas des yeux, l’a l’air estomaqué ! Henri rougne dans sa barbe, j’entends parfois le mot « sandre ».
C’est le silence. Je crois que y a qu’à la pêche que j’aime le silence. Et hop, d’un coup soudain, mon bouchon plonge, Adèle tire.

- Holà, pas trop vite ! pas trop fort ! Laisse filer un peu ! C’est ça, allez on ramène maintenant ! Attends, donne la canne, je te montre.

Vé ! Je sors de l’eau une belle truite ! Je l’attrape, la décroche et la met dans le seau. Les deux gars me regardent comme s’ils avaient mangé un Gobi.

- Quoi ?

Ils sifflent, Jojoff applaudit !

Jojoff. T’as vu ça Henri ? La vitesse ?
Henri. Ouais, c’est du geste de pro.
Adèle. Je veux apprendre à faire ça !

Je suis fière comme un bar tabac et toute rouge je crois bien.

On a continué comme ça entre silence de l’attente et explosion de joie d’Adèle chaque fois qu’un poisson sortait de l’eau. Henri a beaucoup grogné parce que l’a pas vu le bout d’une nageoire de Sandre. Jojoff était déçu qu’il y ait pas de sardines dans le lac parce qu’il sait bien les faire au barbecue.

Bé tu vois, ça faisait famille. C’est ça qui était bon. Et mon papa, si de là ou il est, y peut me voir, je sais qu’il est fier de sa nine.

Ho papou, t’sé, j’ai bien pensé à toi, et des fois quand Jojoff y me regardait, c’est tes yeux que je voyais, et des fois quand Henri y rougnait, c’est ta voix que j’entendais, et des fois quand Adèle riait, c’était moi. Té ça ferait un beau film pour le Javot ça ! Tu crois pas ? Tu me manques papou… Vé, voilà que mes yeux pleurent quand mon cœur est heureux. Tu sé, à toi je peux le dire, je voudrais rester ici, à l’auberge, pour toute ma vie. Je me sens bien. Tu sais l’oncle, y fait de son mieux et mamouchka aussi, sur ! Mé bon, même si je montre pas, j’étais pas bien heureuse avec eux, en tout cas, pas comme ici.

Parce qu’ici, tu vois, je peux être moi, Natou l’aventurière, celle qui te faisait rire, mon papou. Et ça tu vois, de le retrouver, j’ai plus envie de le quitter. Et tout ça, c’est grâce à Jojoff qu’est si gentil et Monsieur Henri qu’est bourru mais qu’est bien tendre, et Adèle qui est si vive et Virginie qui aime tant les animaux, et Brigitte qui est si douce et si fragile aussi avé son Gérard qu’est tellement amoureux, et le Javot qu’est un drôle de fadoli, et Anne-Katherine qui a l’air bien heureuse ici aussi, et June qui est reparti, et Dame nature qui m’a fait une si belle couronne de fleurs pour le balleti et Damejeanne qui m’a fait confiance pour m’occuper de sa fille, et le voyant bé sur, tu connais son nom toi, papou, Paul qui s’appelait. J’aimerai bien le revoir un jour lui. Il a été bon pour moi ici quand Toni il a fait sa colère.

Et Papou ? Tu l’aimerais bien, toi, le Toni ?

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